Interview exclusive « les concerts d’Orelsan »

Toutes les photos sont de la géniale ©MarionRuszniewski/www.marion-photographie.com

Lundi 6 février 2012 – Le Bataclan

3ème passage pour Orelsan dans la petite salle parisienne. 2ème fois en trois mois au Bataclan. Et c’est complet, forcément. J’allais pas louper ça quand même !

« Sèrieux, il te reste encore  des questions à me poser ? » me demande-t’il quand je le rejoins avec ma photographe (et cameraman ou plutôt iphone-woman pour l’occasion) dans sa loge, deux petites heures et demi avant sa montée sur scène.

Oui, Orel, il reste encore des (toutes petites) choses que je ne sais pas sur toi. Il est vrai qu’il fait partie de ces artistes que j’ai eu presque tous les mois au téléphone, ces dernières années (comme La Fouine, Booba ou Soprano) ou en face à face pour diverses interviews.

Le jeune rappeur caennais devenu presque parisien fait aussi partie des plus accessibles, des plus gentils et, surtout, des plus naturels et simples de la profession. Une petite interview (la première) pour mon blog, même pour peu de temps, c’était tout de suite d’accord.

Alors, pendant quelques minutes, on parle de concerts. De ses expériences des concerts des autres, des siens, de ses fans, de ses habitudes,  de ses souvenirs.

Très détendu, comme toujours ! Merci Orel !

Orelsan – ITW exclusive dans les coulisses du Bataclan

Et pour le live report, c’est ici, sur welovemusic.fr !

Je suis allée faire un tour dans la tête de Redouanne Harjane

Vu sur scène lors de la Release Party de Youssoupha (comment je me la pète trop). Gros coup de coeur à m’étouffer de rire. Redouanne Harjane est clairement la chose la plus intelligemment drôle qu’il me soit arrivée ces derniers temps. Alors je fais tourner !

J’avais déjà vu un de ses sketchs à la télé lors d’un spectacle de Jamel à Marrakech. J’avais adoré sa nonchalance, son mauvais esprit et sa petite chanson absolument affreuse où il racontait comment, petit, il faisait passer son grand-père pour un pédophile, juste pour se marrer un coup.

Redouanne Harjane – Marrakech du rire 2011

Je l’ai retrouvé le 25 Janvier sur la scène du Jamel Comedy Club, invité par le rappeur Youssoupha lors de la Release Party pour son dernier opus, Noir désir. Là, j’ai failli cracher ma bière sur mes voisins de devant tellement sa chanson d’amour carcéral, devant ce public de fan de rap, avait quelque chose de génialement décalé ! Le pire, c’est qu’il est tellement doué, l’oiseau, que sa petite mélodie au piano est restée dans ma tête et que j’ai continué à le fredonner, dans la queue du Monoprix (« ho, amour carcéral, ho ho », la tête des vieux !) pendant une semaine.

Jamel Comedy Club, un soir glacé de fin Janvier

 

Je n’ai donc pas pu m’empêcher d’emmener des potes, la semaine d’après, découvrir cet extra-terrestre de l’humour. Le froid glacé avait quelque peu refroidit les ardeurs des spectateurs et c’est en petit comité que nous nous sommes retrouvés dans la salle si chaleureuse du Comedy Club de Jamel. 1er rang oblige, on s’est fait tout petits pour éviter de se faire chambrer direct. Parce-qu’il a beau écrire ses spectacles avec une plume très assurée, ça ne l’empêche pas de bâcher tranquillement le public. Sa victime du soir (qui était aussi celle de sa très bonne première partie Noman Hosni) s’appelait Malik et avait de magnifique cheveux blond platine. Redouanne l’a donc surnommé, dés les premières secondes, « Sunshine ». Sublime.

Le spectacle est à la fois réglé comme une pendule suisse de papier à musique et assez fouillis pour nous perdre avec plaisir. Redouanne est un roi du comique de l’absurde, enchaînant les réflexions personnelles sans aucun rapport les unes avec les autres, auxquelles on rit aux éclat avec un peu de recul, le temps d’être sûrs d’avoir tout bien compris . Parce qu’en plus d’être un musicien hors pair, ce faux grincheux fait partie de ces humoristes à la plume trempée dans le vitriol et à la tête bien pleine.

Redouanne Harjane – Montreux

J’avoue, je le catégoriserais bien, pour son incorrectitude politique (non, ça n’existe pas ce mot mais moi j’aime bien) et son cynisme truculent, dans la case des dignes successeurs de Dieudonné. Faux endormi-bourré-défoncé, Redouanne assène des horreurs à la chaîne (« des fois, quand je suis énervé, je m’amuse à jeter des côtes de porcs sur les musulmans. C’est cool ! Ils brulent! ») en bafouillant. Et même ses silences et ses balbutiements sont hilarants.

Redouanne, c’est le genre de mec dont tu gardes en toi chacune de ses vannes. Et pendant des jours, dés qu’un pote lance un sujet, t’as envie de dire « oh, ça me fait penser à une vanne de Redouanne… » Mais tu la dis pas, racontée par toi, c’est tout moisi…

Youssoupha, notre Jay-Z français ?

Oserais-je dire que c’est l’album de l’année ? Oui, parce-que c’est clairement ce que j’ai écouté de mieux depuis au moins un an en rap français ! Désolée mais le Noir désir de Youssoupha, je m’en remets pas. Et je suis pas la seule, apparemment…

On avait rarement vu un tel consensus sur le Twitter des hip-hopeurs! Depuis la sortie, lundi 23 janvier, du nouveau Youssoupha, les twitts ne cessent de tomber. Despo Rutti, Rim’K, Omar et Fred, Grodash, 20Syl d’Hocus Pocus, Tunisiano de Sniper… Tous les avis sont unanimes : Noir Désir, ça tue ! Et pour reprendre notre ami Mouloud Achour, il est clair que Youss’ signe ici son Blueprint à lui !

Qu’est-ce qui fait d’un album qu’on sent la différence avec les autres ? Bien difficile à dire. Sur les chemins du retour était un excellent opus, en 2009. Le Blédard devenu banlieusard y racontait, tel un fil rouge, son attachement à l’Afrique mais aussi ses amours déçus sur Apprentissage, son baby blues sur Le message ou ses souvenirs de MC sur 15 ans en arrière. A force de le dire et L’effet papillon sont des morceaux qui ont plutôt très bien marché.

Entre temps, il y a eu le buzz. Né de cette petite phrase dans A force de le dire, « Chaque fois que ça pète, on dit que c’est nous, j’mets un billet sur la tête de celui qui fera taire ce con d’Eric Zemmour », provoquant par la même un tollé médiatique et un procès (malheureusement perdu par notre lyriciste bantou préféré). Mais le buzz ne fait pas tout. Youss’ semble avoir acquis une nouvelle liberté. Pas de ton, bien sûr, puisqu’il ne s’est jamais censuré. Mais peut-être son départ de chez EMI pour créer sa propre structure, Bomayé Musik (Bomayé qui signifie « tue-le » en lingala) lui a ouvert de nouveaux chemins musicaux.

En tout cas, il a commencé par une géniale digitape, en 2011, En noir et blanc, avec des morceaux bien efficaces comme La foule II, Clashes, Revolver ou Rap Franc CFA, un de mes titres préférés !

Youssoupha – Rap Franc CFA

Couillu comme au moins 10 rockeurs, le rappeur n’a pas hésité à balancer comme tout 1er extrait de son nouvel opus un Menace de mort revenant directement et sans langue de bois sur le procès l’opposant à Eric Zemmour. Bénéficiant d’un clip hors pair (un concept déjà utilisé mais ultra bien réalisé quand même), ce morceau frôle le génie au niveau de l’écriture, ciselée et toujours très imagée comme de la production de Soul Children avec un violon lancinant et déchirant.

Youssoupha – Menace de mort Remix avec Sniper, Mr R et La Rumeur

On continue le carnage avec le très egotrip Irréversible, où ses qualités de rappeur sautent aux oreilles. Comme il le dit en souriant sur L’amour, le premier morceau de l’album, « bien sûr que le meilleur rappeur de France a un cheveu sur la langue. »

Youssoupha – Irréversible

Oui mais tout ça, ça fait pas forcément un Blueprint hexagonal !

Alors, qu’est-ce qu’on trouve en plus dans cet opus et qui fait de Noir désir un futur classique du rap français ?

 

1. Une énorme richesse dans les sons, des samples cainfr’, des rythmes Bollywood, de la soul, du funk. Tout ça super produit, of course, par Soul Children, Skalp et CHI.
2. Un travail d’écriture poussé à son extrême. Qui aime le rap aime les punchlines et ici, on n’a qu’à se baisser pour en trouver des dizaines par huit mesures.
3. De l’intime comme de l’egotrip ou du chanté. Youss’ tape dans tous les registres ! Il parle de son père, invite Corneille pour un pur morceau R&B, claque de grands coups de gueule sociaux ou critique le rap français actuel.
4. Il signe le grand retour de Kery James en l’invitant à la fin de son meilleur morceau, le très dubstep La vie est belle. Rien que pour ça, moi, je l’aime…

A$AP Rocky, le bad boy qui monte, qui monte…


Chaque année du hip-hop porte son lot de jeunes espoirs aux dents plus ou moins longues.A$AP Rocky a les crocs super acérés et pourrait mordre ses collègues jusqu’au sang… Alors qu’il vient de sortir son dernier clip, Wassup, où il se prend gentiment pour Tony Montana, retour sur un phénomène en devenir!

A$AP Rocky – Wassup

En 2011, l’on a donc découvert (enfin, moi, c’est mon pote Silent Hype qui m’a ouvert les oreilles) cet énergumène adepte de gros Blunts (un rappeur qui fume de la drogue, comment c’est trop original !), de Blings, de postures de super méchant Bad boy qui va te défoncer ta gueule sous peu, de poses avec des tas de Billets verts. Les 4 « B » préférés des rappeurs qui se la jouent un peu ! Bref, à l’ouest, rien de bien nouveau.

Alors je me suis penché sur son cas. Parce que, si on a vu passer son nom un peu partout sur les sites de hip-hop ricain (et français), ça devait quand même bien être pour quelque chose ! Côté parcours, toujours pas vraiment de l’inédit. Dés ses 12 ans, le jeune homme originaire de Harlem n’a plus trop vu son paternel, incarcéré pour vente de drogues. Un an plus tard, on continue dans le super joyeux, son frère ainé a été tué juste à côté de chez eux. Celui qu’on avait appelé Rakim en partie en hommage à Eric B. & Rakim se met alors très sérieusement au rap. Un peu bagarreur, il récolte le surnom de Rocky. Grand fan du gangsta rap des années 90 et du groupe de chez lui The Diplomats,  il se lance à fond dans la musique dés l’adolescence, complétant son blaze d’un A$AP pour « Accumulate Status And Power ».

Ça, c’est donc pour la petite histoire. Pour celle de la musique, il déboule au début de l’an dernier avec Get High, apologie de la fumette. Sympa, assez léger, on attend d’écouter la suite…

A$AP Rocky ft. Dee FERG – Get High

En juillet arrive Purple Swag. Le flow est si lent et lancinant qu’on dirait que le Mc a enregistré sous l’emprise de substances illicites.Couillu, quand même, quand on vient de la grosse pomme, de rapper comme un vrai sudiste ! Enfumé, le morceau se traine sur un violon fatigué et fait mal aux oreilles tant il est efficace.

A$AP Rocky – Purple Swag

Débarque ensuite le très bon et plébiscité Peso.

ASAP Rocky – Peso

Le style d’ASAP est confirmé avec sa première mixtape officielle sortie en octobre, LiveLoveA$AP. Le jeune homme aime le rap sous prod’, tout nuageux, super egotrip, qui parle de mecs fonce-dés qui s’éclatent avec des meufs et rêvent de thunes. Ça « motherfuck », ça « thug » et ça « swag » à tout va. C’est du rap un peu dérangé et, même si certains voient en lui une pâle copie de l’excellent Curren$y, ASAP défonce joyeusement tout sur son passage. Les meilleurs morceaux, les plus perchés, étant ceux qu’il signe avec son pote producteur Clams Casino. Comme ce très onirique, version nightmare, Palace.

A$AP Rocky – Palace

En attendant l’album, la tape est en téléchargement gratos. On aurait tort de se priver…

Dry déboule cagoulé !

Le nouveau D.R.Y arrive le 20 Février. « Tôt ou Tard », il va bien falloir que ce Mc d’exception rencontre enfin le succès qu’il mérite !

Ça fait partie des grandes frustrations, quand on est journaliste. Il arrive toujours un moment où l’on se passionne pour un artiste… et où l’on se retrouve un peu seul-tout ! J’avoue, moi, ça m’arrive souvent parce que je suis une grande spécialiste des coups de cœur. Et c’est encore pire quand je rencontre les artistes en question et qu’ils sont sympas. Malheureusement, en dehors de 3-4 exceptions (le récent Childish Gambino, Adèle il y a quelques années, Imany, Kanye West à ses débuts), mes grandes passions n’ont pas vraiment connues les succès publics qu’elles méritaient… Qui a vraiment entendu parler des Frer 200 ? D’Abass Abass ?  De C.Sen ? De Milk Coffee & Sugar ? De ME ? Foreign Beggars ? Graine de caf ? Hyro Da Hero ?

Pas grand monde, il faut être honnête. Mais je m’en fous, moi, je continue mon combat le poing levé, sûre de mes goûts. L’un de mes chouchous depuis des années, tout le monde le connait, c’est un membre de la Mafia K’1 Fry, du groupe Intouchable et du label Wati-B. Pour moi, c’est l’un des rappeurs les plus doués de sa génération, du fait de son passif et de son ouverture d’esprit. C’est aussi le congolais qui a le plus grand sourire et le plus grand cœur au monde (on dirait pas, mais je crois que j’ai des racines marseillaises, moi…).

Il s’appelle donc Dry, D.R.Y pour les intimes et il a sorti en septembre 2009 un petit bijou, Les derniers seront les premiers, 1er album solo très injustement passé inaperçu ! Petite présentation . Il a le physique d’un adolescent mais une carrière de warrior. Landry, 32 ans, né à Villepinte, est resté très attaché à la ville qui l’a vu grandir, Orly. Avec son physique atypique, grand et tout sec, son immense sourire qui réchauffe le cœur et sa douceur angélique, il n’était pas forcément prédestiné à devenir rappeur. C’est un peu son environnement qui a choisi pour lui. Marqué par le jeune Kery James, il a rencontré très tôt Jessy Money, Teddy Corona et, surtout, Demon One. A 18 ans, Landry devient Dry mais préfère toujours rester en second plan. Il est plus du genre à regarder les autres faire leurs freestyles et assurer les backs des autres. C’est Kery James qui, le 1er, l’oblige à poser pour de vrai sur l’album de la Mafia K’1 Fry, Légendaire, en 1999. A force d’encouragement, Dry suit ses potes Demon et MS pour former Intouchable. LA$ et Mamad, disparus aujourd’hui, font également partie des fondateurs du groupe mais suite à de nombreux incidents sur lesquels aucun membre de la Mafia n’a jamais aimé s’étendre, Intouchable finit en duo.

Dry pose sur tous les albums de la Mafia K’1 Fry et sort avec Intouchable  Les Points sur Les I en 2000, le maxi I Have a Dream en 2001, Original Mixtape et La Vie De Rêve en 2005. Demon sort Mon rap en 2007, Demons et merveilles en 2009 mais Dry, lui, n’est pas encore sûr d’être prêt à passer en pole position. Il faudra attendre l’enregistrement de son street album, De la pure pour les durs, sorti en avril 2008, pour qu’il se prenne au jeu. Le public, par ses bons retours, lui montre qu’il est finalement très attendu. Le « renoi til-gen, toujours souriant » sort alors en septembre 2009, Les derniers seront les premiers, aidé par ses potes de Wati B. Les textes sont écrits avec le cœur comme La pièce, un titre intelligent sur les SDF. Chacun de ses 22 titres est empreint d’une réalité brute et touchante. Les prods sont tout ce qu’il y a de plus éclectique, du funk dansant de Kick dur aux violons angoissants de Technik en passant par les basses électro saturées de Fidèle au poste.

Hé vous avez vu, dans le clip, presque toute la Sexion d’Assaut est dans la place !

Dry – Fidèle au Poste

Il aurait pu être quelque peu dégouté de l’accueil pas du tout à la hauteur de son talent qu’a reçu son premier bébé. Mais Dry n’est pas du genre à baisser les bras et sort, le 20 février 2012, un nouvel album Tôt ou Tard.

Les premiers extraits annoncent du bien lourd, comme cet excellent L’amiral, ici avec le clip version longue non censurée.

Dry – L’amiral
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Et surtout, le génial 2nd extrait, Cagoulé, bien sous tension!

Dry – Cagoulé

La suite au prochain numéro !