Rim’K, c’est mon Tonton à moi !

Quand on a interviewé un artiste de nombreuses fois, on a parfois l’impression qu’il fait un peu partie de notre famille. Une tendresse particulière s’installe avec ceux qui sont plus réceptifs à tes questions, qui font un effort pour ne pas te donner la même réponse qu’au journaliste précédent. Pas forcément pour un question d’âge, plutôt une histoire de respect, Rim’K a toujours été un peu comme un tonton pour moi. Le mec à qui tu peux raconter certains trucs que tu ne dis pas aux autres, avec qui tu te marre bien et qui te confie des histoires un peu extraordinaires. Chef de famille, Karim ? Oui certainement !

J’ai du faire ma toute première interview de Rim’K il y a 7-8 ans pour le quotidien 20 Minutes. A l’époque, le 113 venait de sortir son troisième opus, 113 Degrés, qui fonctionnait aussi bien que les précédents. J’avais rencontré le trio dans le hall d’un restaurant un peu chic du côté du quartier de la Bastille à Paris. Je me rappelle des murs en velours rouge et surtout, de la décontraction de ces trois rappeurs impressionnants (ne serait-ce que physiquement, ils sont tous deux fois plus grands que moi !) dans ces lieux un peu incongrus. Etre une nana journaliste de rap ne m’a jamais posé souci. Mais je ne dis pas que je n’ai pas eu, parfois, quelques boules au ventre. Celle qui est apparue quand je les ai rencontrés s’est tout de suite envolée au fur et à mesure de la discussion. En face de moi, j’avais un AP tout sourire, un Mokobé qui me scrutait avec un regard assez bienveillant et un Rim’K bavard qui me racontait des anecdotes sur l’album et aussi sur l’histoire du 113 au sein de la Mafia K’1 Fry. La suite de mes rencontres avec Karim a toujours été teintée de la même joie communicative et de la même considération mutuelle. Grand déconneur devant l’éternel, Rim’K est aussi un discoureur qui prend des airs de conteur. Son timbre grave pousse à l’écoute et j’ai souvent regretté que nos entretiens ne durent pas longtemps.

De plus, j’avoue que le bonhomme ne m’a jamais déçue au niveau de ses productions solos. L’enfant du pays a été une grosse claque pour tous les médias rap tant l’album, à la fois intimiste et très rap, nous a plu. Même sanction pour Famille Nombreuse et comment ne pas trouver géniale l’idée d’un album rebeu-hip hop commun avec Maghreb United ! Pendant toutes ces années, Rim’K a su fédérer autour de lui une fanbase ultra métissée, de tous les âges, qui nourrit pour lui une affection ultra forte (qui n’a jamais été à un concert du 113 ou de Rim’K e sait pas ce qu’est l’amour d’un fan pour son artiste préféré). L’album suivant était donc des plus attendus. Qu’allait donc donner ce fameux Chef de famille ? Le 1er extrait, Portrait robot, nous offrait une image que l’on connaissait déjà de Rim’K. Celle d’un rappeur qui est accro au micro et qui n’a pas peur d’ouvrir aussi parfois un peu son coeur en public. Flows et prod impeccables, comme toujours, rien à redire ! C’est à partir du Call of Bitume avec Booba que tout s’est emballé. A raison ! Un duo inédit et exceptionnel. Et un morceau à couper le souffle, surtout ! L’association n’était pas évidente mais Karim a choisi une prod de Therapy bien rentre-dedans et a encore alourdi son flow pour un titre des plu enthousiasmant !

Rim’K & Booba – Call Of Bitume

Trépignant pour recevoir le reste de l’album, j’ai apprécié chacun des 17 titres comme autant de sucreries qu’une gourmande de bon rap comme moi sait apprécier. Le gros son est là avec des GPS et autres Classico. La fête est là aussi avec Tonton Music Club ou I Love My Bled. L’émotion est omniprésente via les sublimes Urbaine Poésie feat. Toma et Grand Corps Malade ou mon préféré, Bac-5 avec Awa Imani.

Quand on te fait de beaux cadeaux, ma maman m’a toujours dit qu’il fallait remercier à sa juste valeur alors MERCIIIII Tonton !

Dry déboule cagoulé !

Le nouveau D.R.Y arrive le 20 Février. « Tôt ou Tard », il va bien falloir que ce Mc d’exception rencontre enfin le succès qu’il mérite !

Ça fait partie des grandes frustrations, quand on est journaliste. Il arrive toujours un moment où l’on se passionne pour un artiste… et où l’on se retrouve un peu seul-tout ! J’avoue, moi, ça m’arrive souvent parce que je suis une grande spécialiste des coups de cœur. Et c’est encore pire quand je rencontre les artistes en question et qu’ils sont sympas. Malheureusement, en dehors de 3-4 exceptions (le récent Childish Gambino, Adèle il y a quelques années, Imany, Kanye West à ses débuts), mes grandes passions n’ont pas vraiment connues les succès publics qu’elles méritaient… Qui a vraiment entendu parler des Frer 200 ? D’Abass Abass ?  De C.Sen ? De Milk Coffee & Sugar ? De ME ? Foreign Beggars ? Graine de caf ? Hyro Da Hero ?

Pas grand monde, il faut être honnête. Mais je m’en fous, moi, je continue mon combat le poing levé, sûre de mes goûts. L’un de mes chouchous depuis des années, tout le monde le connait, c’est un membre de la Mafia K’1 Fry, du groupe Intouchable et du label Wati-B. Pour moi, c’est l’un des rappeurs les plus doués de sa génération, du fait de son passif et de son ouverture d’esprit. C’est aussi le congolais qui a le plus grand sourire et le plus grand cœur au monde (on dirait pas, mais je crois que j’ai des racines marseillaises, moi…).

Il s’appelle donc Dry, D.R.Y pour les intimes et il a sorti en septembre 2009 un petit bijou, Les derniers seront les premiers, 1er album solo très injustement passé inaperçu ! Petite présentation . Il a le physique d’un adolescent mais une carrière de warrior. Landry, 32 ans, né à Villepinte, est resté très attaché à la ville qui l’a vu grandir, Orly. Avec son physique atypique, grand et tout sec, son immense sourire qui réchauffe le cœur et sa douceur angélique, il n’était pas forcément prédestiné à devenir rappeur. C’est un peu son environnement qui a choisi pour lui. Marqué par le jeune Kery James, il a rencontré très tôt Jessy Money, Teddy Corona et, surtout, Demon One. A 18 ans, Landry devient Dry mais préfère toujours rester en second plan. Il est plus du genre à regarder les autres faire leurs freestyles et assurer les backs des autres. C’est Kery James qui, le 1er, l’oblige à poser pour de vrai sur l’album de la Mafia K’1 Fry, Légendaire, en 1999. A force d’encouragement, Dry suit ses potes Demon et MS pour former Intouchable. LA$ et Mamad, disparus aujourd’hui, font également partie des fondateurs du groupe mais suite à de nombreux incidents sur lesquels aucun membre de la Mafia n’a jamais aimé s’étendre, Intouchable finit en duo.

Dry pose sur tous les albums de la Mafia K’1 Fry et sort avec Intouchable  Les Points sur Les I en 2000, le maxi I Have a Dream en 2001, Original Mixtape et La Vie De Rêve en 2005. Demon sort Mon rap en 2007, Demons et merveilles en 2009 mais Dry, lui, n’est pas encore sûr d’être prêt à passer en pole position. Il faudra attendre l’enregistrement de son street album, De la pure pour les durs, sorti en avril 2008, pour qu’il se prenne au jeu. Le public, par ses bons retours, lui montre qu’il est finalement très attendu. Le « renoi til-gen, toujours souriant » sort alors en septembre 2009, Les derniers seront les premiers, aidé par ses potes de Wati B. Les textes sont écrits avec le cœur comme La pièce, un titre intelligent sur les SDF. Chacun de ses 22 titres est empreint d’une réalité brute et touchante. Les prods sont tout ce qu’il y a de plus éclectique, du funk dansant de Kick dur aux violons angoissants de Technik en passant par les basses électro saturées de Fidèle au poste.

Hé vous avez vu, dans le clip, presque toute la Sexion d’Assaut est dans la place !

Dry – Fidèle au Poste

Il aurait pu être quelque peu dégouté de l’accueil pas du tout à la hauteur de son talent qu’a reçu son premier bébé. Mais Dry n’est pas du genre à baisser les bras et sort, le 20 février 2012, un nouvel album Tôt ou Tard.

Les premiers extraits annoncent du bien lourd, comme cet excellent L’amiral, ici avec le clip version longue non censurée.

Dry – L’amiral
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Et surtout, le génial 2nd extrait, Cagoulé, bien sous tension!

Dry – Cagoulé

La suite au prochain numéro !

Mafia K’1 Fry jusqu’à la mort !

MAFIA K’1 FRY
Potes jusqu’à la mort

« C’est un honneur de représenter les plus faibles » a dit Demon One. Il y a des collectifs qui semblent éternels. La Mafia K’1 Fry est de ceux-là. Fondé à la fin des années 90, la Mafia a presque 18 ans (un nouvel album pour la majorité ?) et ses membres, tous potes, restent toujours soudés. Les albums se suivent, avec tous de beaux succès mais les rappeurs aiment à toujours autant à se retrouver en studio. A la vie, à la mort !

C’est Douma le Parrain (de Choisy-le-Roi) qui trouve le nom de Mafia K’1 Fry lors d’un freestyle improvisé à la Demi-Lune, un quartier d’Orly où, entre les tours, ils se retrouvaient pour poser leurs premières phases, tout gamins (« Tu peux pas test avec la Mafia K’1 Fry »), aux alentours de 1995. Si tous les MC’s de la Mafia ne devaient avoir qu’un point commun, ce serait l’appartenance géographique. En effet, ils sont tous issus du département du Val-de-Marne, soudés autour du triangle d’or Ivry-Vitry-Choisy.

Difficile de les compter tant la composition a changé au fil du temps. Entre les morts tragiques (encore très douloureuses aujourd’hui pour chacun des membres, qui refusent d’en parler), les passages en prison ou les départs, tout simplement, le collectif oscille entre 15 et 30 membres. Une seule chose est sûre et certaine, tous ces mecs-là sont des amis, des vrais, depuis l’enfance. Une grande famille dans laquelle il y a souvent des dissensions mais qui continue à vivre très proches les unes des autres au-delà des années.

Auparavant baptisé L’Union, le collectif a été fondé autour de Kery James (leader de Ideal J) et Manu Key (leader de Different Teep). Les origines géographiques exactes sont, à Vitry, les quartiers de Camille Groult, Robespierre ou de la cité Balzac, à Choisy ceux de Jacques Cartier et Henri Barbusse) et à Orly ceux des Saules & de la Demi-Lune) voire Ivry et Joinville-le-Pont (Barbusse) d’où est originaire Selim du 94.

Seulement deux vrais albums

Alors, oui, certains hurleront : « non ! 4 ! » C’est vrai, le collectif a réalisé deux mini-albums: Les Liens Sacrés et Légendaire en 1997 et 1998 avant que Kery ne s’éloigne, en 2003 (pour revenir sur 1 titre puis sur plusieurs sur les albums suivants, quand même, c’est pas un lâcheur !). Mais côté vrais gros albums, seulement deux.

En 2003, la majeure partie des membres du collectif se rassemble pour réaliser La Cerise Sur Le Ghetto, qui marquera notamment les esprits avec le clip du morceau Pour Ceux.

Mafia K’1 Fry – Pour Ceux

Un documentaire retraçant l’histoire du crew a suivi. Baptisé Si Tu Roules Avec la Mafia K’1 Fry,
Quatre ans plus tard, les seize MC hurlent à nouveau leur rage ensemble et déclarent la guerre aux injustices avec le second opus Jusqu’à la Mort. En quinze titres aux basses surpuissantes, la Mafia confirme être l’un des collectifs les plus efficaces du rap français, mais aussi l’un des plus politisé. «C’est un honneur de représenter les plus faibles» expliqua Demon One dans 20 Minutes, «Aujourd’hui, la situation est tellement tragique dans les quartiers qu’on se croirait sous l’occupation. Il faut bien qu’on entre en résistance.»

Aujourd’hui, si l’on compte tous les albums solos de ses membres, la Mafia dans son ensemble a sorti prés de cinquante. Un collectif qui continue à peser de tout son poids sur la scène rap française !

COMPOSITION
Grosso merdo, la Mafia K’1 Fry compte un peu plus de 16 membres à son collectif :
• Rohff
• Kery James
• 113 (Rim-K, AP et Mokobé)
• Intouchable (Dry et Demon One)
• Manu Key
• OGB
• Teddy Corona
• Jessy Money
• Selim du 94
• Mista Flo
• DJ Mosko
• Rocco
• Karlito