De l’autre côté de la frontière du plat pays, Scylla est déjà un daron du peura belge. Son flow caverneux et ses textes conscients touchent immédiatement les fans d’ambiances pesantes et de hip-hop qui claque. Fans de rap-jeu et d’entertainment youpiyouyoupila, passez votre chemin, le monsieur n’est pas là pour rigoler! Son dernier opus, Abysses (qui porte bien son nom) m’a juste complètement retournée la tête ! Et comme ma générosité me perdra, je vous offre une grosse tranche de bonheur rappologique et vous ouvrant les portes de son univers dense et complexe. En vous remerciant…
Les artistes n’aiment pas les comparaisons mais nous, les journalistes, on adore. Et puis, ça nous donne des repères… Moi, je dois l’avouer, quand j’ai écouter Scylla pour la première fois, j’ai tout de suite pensé aux débuts coup de poing de Sinik (et pour moi, le parallèle est flatteur). Mais ici, le timbre est encore plus rauque et prend sa source aux profondeurs du rap. SCYLLA découvre les plaisirs de la plume en 1998. Après quelques apparitions sur mixtapes, il fonde en 2002 le collectif OPAK avec DJ ALIEN, KARIB, MASTA PI et L’AB7. Deux opus naissent de cette collaboration, « L’arme à l’oeil » et « Dénominateur commun », sortis respectivement en 2004 et 2006. Puis la carrière en solo s’impose : en 2009, première « plongée » au cœur de son univers artistique trés personnel par l’intermédiaire d’un CD 5 titres intitulé « Immersion ». La descente dans ses profondeurs se poursuit en 2011 avec le projet 9 titres « Thermocline« , téléchargeable gratuitement sur sa page officielle facebook. Puis c’est au tour, en Juin 2012, de « Second Souffle« .
Scylla – Second Souffle
C’est à ce moment-là que je le rencontre musicalement. Ce titre, qui sonne comme une version encore plus dark du Nés sous la même étoile d’IAM, me plait forcément. Il y a chez lui un désespoir ouvert sur les autres et une mélancolie qui ne pousse pas à la tristesse. Ça parait contradictoire mais c’est vrai. Plus ces morceaux sont noirs, plus ils font du bien. Au niveau de la technique, on est dans la maîtrise totale de l’émotion, sans jamais tomber ni dans le pathos ni dans la victimisation. Scylla avance sans oeillères et martèle le monde avec le Mjöllnir de Thor. C’est puissant, forcément mais c’est surtout du vrai rap conscient comme je n’en avais pas écouté depuis bien longtemps.
Le temps du premier album sonne enfin et Abysses est juste un petit bijou du genre ! 15 titres avec peu de featurings (Furax Barbarossa sur l’orchestral Erreurs Génétiques, R.E.D.K et Tunisiano sur le couperet Coupable) avec toujours plus de lourdeur (dans le bon sens du terme) dans le flow comme dans les textes. De plus, Scylla sait s’entourer de graphistes et de réalisateurs de talent. A l’image de la présence des Soulchildren sur 2 morceaux (dont Second Souffle) et du sublime clip du morceau éponyme de l’album, entièrement animé !
Scylla – Abysses
Les noms des morceaux sont aussi imagés que ses lyrics sont blindés de fines métaphores : La sagesse d’un fou, La logique d’une contradiction… Et parce-que je suis une midinette fan des classiques piano-voix, mon morceau préféré reste le touchant Douleurs Muettes.
Scylla – Douleurs Muettes
Voilà, Scylla c’est tout ça et bien plus encore. A vous de découvrir la suite !